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Un prof met en garde les élèves contre les dangers d'internet

06h00 par Céline AUCHER | Mis à jour il y a 2 heures

Comment éviter de s'exposer sur internet? Réponse avec Nicolas Vauzelle, formateur numérique auprès des enseignants en Charente, qui travaille aussi avec des élèves, du collège au BTS.

Nicolas Vauzelle: "Beaucoup de jeunes croient parler à des jeunes de leur âge sous prétexte qu'ils écrivent comme eux avec des "lol"." Nicolas Vauzelle: "Beaucoup de jeunes croient parler à des jeunes de leur âge sous prétexte qu'ils écrivent comme eux avec des "lol".". PHOTO/ Renaud Joubert

"Comment préserver son identité numérique?" et accessoirement éviter de se faire piéger par internet. C'est l'un des ateliers proposés aux BTS du lycée Marguerite-de-Valois à Angoulême la semaine dernière dans le cadre d'un séminaire inédit.La spécialité de Nicolas Vauzelle, professeur de maths à mi-temps, anciennement au collège de Montmoreau, juste muté à Marguerite-de-Valois.

L'unique formateur numérique auprès des enseignants du second degré en Charente, également président de l'association Espace public numérique du Sud-Charente. Un formateur hypersollicité pour faire de la prévention sur les risques d'internet et des réseaux sociaux.

Vous intervenez auprès des enseignants, mais aussi auprès des élèves, du collège au BTS. Majeurs et mineurs sont-ils  aussi ignorants face à internet?

Nicolas Vauzelle. Au début, j'avais deux formations différentes, mais je me suis rendu compte que la naïveté était à peu près la même. Beaucoup d'adultes ignorent par exemple comment des sites gratuits rapportent des milliards. À l'instar de Facebook, ils se rémunèrent en revendant les données personnelles aux entreprises qui font ensuite de la publicité ciblée. ça laisse un champ illimité. Rien n'empêcherait un jour de retrouver ce qu'on a dit de vous ou ce que vous avez dit sur les autres sur un moteur de recherche comme Google. Ma mission principale est de former les enseignants pour relayer ce message. Mais la demande est tellement criante au niveau des élèves que je suis intervenu ces deux dernières années en plus de ma mission. On a formé deux salariés de l'association Espace public numérique pour aller dans les établissements qui le souhaitent.

Facebook est en principe interdit aux moins de 13 ans. D'après un sondage TNS-Sofres, 21% des jeunes de cette catégorie ont un compte Facebook en France...

C'est même plus de 50% selon les données que je recueille en classe, 90% en seconde, presque 100% en terminale... Le danger arrive le jour où l'enfant se retrouve tout seul sur internet sans avoir été sensibilisé au préalable. Selon le psychiatre Serge Tisseron, il ne faudrait pas de télé avant 3 ans, pas de jeu vidéo avant 6 ans, pas d'internet, même accompagné, avant 9 ans, le temps pour l'enfant de construire l'empathie. Pour cela, il faut pouvoir distinguer le réel du virtuel. Il y a des réponses très significatives: en classe, tous lèvent la main quand je demande s'ils ont été mis en garde contre un inconnu qui leur offrirait des bonbons... Personne ne les a prévenus des dangers qu'ils courent sur internet!

S'agit-il de bannir carrément Facebook et Twitter?

Mon but n'est pas de dire "n'allez pas sur Facebook", j'y suis moi-même, mais "utilisez ces différents outils en toute connaissance de cause".

Derrière, se joue la notion public/privé: un enseignant ne peut pas se plaindre d'être insulté dans un mail, qui ressort de la correspondance privée, quand ce qui est échangé sur Twitter ou Facebook est public. Pour ces jeunes, l'utilisation du mail arrive loin derrière Facebook et les SMS. Au point que certains jeunes ne savent plus envoyer une pièce jointe!

Des textes de loi existent sur l'insulte, la diffamation ou l'usurpation d'identité... Y a-t-il eu des cas qui sont allés au bout de la voie judiciaire en Charente?

Il y a eu à ma connaissance trois dépôts de plainte pour usurpation d'identité, mais cela s'est réglé avant d'aller au bout de la procédure. Deux de ces cas concernaient des injures envers d'autres camarades et des professeurs à partir d'un profil Facebook usurpé. Mais on a aussi le cas de parents d'élèves qui s'amusent à critiquer le fonctionnement de l'établissement sur les réseaux sociaux. Les problèmes sont souvent liés à la publication de photos et propos calomnieux qui ont d'ailleurs des conséquences en terme de violence dans les écoles. Il ne faut pas hésiter à faire une main courante au commissariat avec une copie d'écran, qui, seule, fait foi du délit.

Au collège Jules-Michelet en juin, la diffusion d'une vidéo de prévention réalisée par la préfecture de police de Paris n'a pas été comprise par les 5e...

Parce qu'elle nécessite une discussion. On est là sur le risque d'un pédophile qui se fait passer pour un jeune sur les réseaux sociaux. Comment peut-on déjouer ce risque? La vidéo ne l'explique pas. Beaucoup d'élèves croient parler à des jeunes de leur âge, sous prétexte qu'ils écrivent comme eux avec des "lol". Dialoguer avec des inconnus, pourquoi pas? Mais pas sur Facebook. Il vaut mieux utiliser un identifiant... qui ne vous identifie pas. Et utiliser la webcam, le moyen le plus sûr de savoir à qui l'on s'adresse vraiment sur internet.